Les Romanov by Carrère d'Encausse Hélène

Auteur:Carrère d'Encausse, Hélène [Carrère d'Encausse, Hélène]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Essai, France, Histoire
Éditeur: Le Toto Invisible - GT
Publié: 2013-07-16T22:00:00+00:00

Le temps des coalitions changeantes

Ce sera la guerre de la troisième coalition. L’Autriche, la Russie et la Suède, soutenues par la Grande-Bretagne, vont constituer un front puissant contre la France et son alliée l’Espagne. Mais l’absence de la Prusse dans cette coalition va poser un délicat problème : comment affronter Napoléon sans passer par la Prusse ? Le roi de Prusse espère tirer avantage de sa neutralité et obtenir l’aide de la France pour s’emparer du Hanovre, vieux rêve prussien. Il interdit son territoire aux armées russes, ce qui n’empêchera pas Bernadotte d’y pénétrer à la tête de troupes suédoises. Alexandre profitera du désarroi prussien pour proposer au roi en difficulté un accord par lequel il lui promettait, dans un article secret, son concours pour faire triompher ses prétentions sur le Hanovre. Ce faisant, Alexandre violait l’accord passé peu auparavant avec l’Angleterre, et devra le payer ultérieurement. Si l’incident est évoqué ici, c’est qu’il témoigne d’une certaine légèreté d’Alexandre, dans la conduite de la politique étrangère, qui se manifestera à maintes reprises sans pour autant effacer le brio de ses intuitions.

L’empereur a rejoint son armée et impose ses vues à Koutouzov. La grande confrontation a lieu à Austerlitz, où les troupes austro-russes dominent en nombre l’armée française. Pourtant, c’est cette dernière qui l’emporte. L’empereur d’Autriche signe le 5 mai un armistice avec Napoléon, stipulant que les troupes russes devront quitter sans délai le territoire autrichien. Koutouzov va conduire leur retraite. La Russie laisse vingt-cinq mille morts sur le champ de bataille. Alexandre en est accablé.

La troisième coalition est morte à Austerlitz, mais Napoléon n’oublie rien de ses ambitions, et l’empereur russe a tôt fait de comprendre qu’il lui faut envisager la suite, se préparer à une autre guerre, s’il ne veut pas que l’Europe entière tombe sous la coupe du Parvenu.

Czartoryski sait qu’il n’est plus écouté par l’empereur. Il lui adresse en 1806 une note où il dresse le bilan de son action et explique les raisons de la supériorité de Napoléon : « Bonaparte a vaincu l’Autriche, la Prusse et la Russie parce qu’il sait mettre à profit l’instant présent… Cela double, triple la force de ses armées. » Il est remplacé par le baron Boudberg, un Balte plutôt prussophile. L’impératrice mère, qui s’est toujours méfiée de Czartoryski, applaudit à son départ, mais s’inquiète des sympathies prussiennes de son fils. Elle n’a pas tort.

La Prusse, qui, en se tournant vers Napoléon, a obtenu le Hanovre, se retourne contre lui, convaincue qu’elle a les moyens de le défier. Une quatrième coalition se forme, à laquelle manquent beaucoup d’alliés. L’Angleterre n’en est pas, parce qu’elle ne pardonne pas à la Prusse de s’être emparée du Hanovre ; ni la Suède, parce qu’elle est l’alliée de l’Angleterre ; ni l’Autriche, écrasée l’année précédente. Restent la Prusse et la Russie.

La décision d’Alexandre Ier de se lancer dans cette guerre est combattue par Czartoryski, par sa mère, par une part non négligeable de son entourage. Les victoires de Napoléon sur les armées prussiennes vont montrer la justesse de l’analyse de Czartoryski.

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